La Boule de Cristal

Horoscopie

Divination qui se pratiquait par l’examen de l’heure de la naissance d’un enfant et en déduisait des présages pour toute la durée de sa vie.

C’était l'astrologie qui servait généralement de moyen à l’horoscopie. La science de l’horoscopie remonte aux temps les plus reculés; les prêtres chaldéens, ceux de l’ancienne Égypte, furent de grands faiseurs d'horoscopes. Les Grecs leur empruntèrent ce mode de divination et le transmirent aux Romains. Ceux-ci lui donnèrent le nom d’ascendant, parce que la base principale de ses opérations était chez eux l'observation de l’astre qui montait, qui faisait son ascension sur l’horizon à l'heure de la naissance du sujet. C’est de là qu’est venue l’application du mot ascendant pris dans le sens d’influence. On subissait l’ascendant d’un astre; on a dit, par extension, l'ascendant d’une personne.

Chose digne de remarque, la mode des horoscopes avait fini par ne plus inspirer de confiance sous le règne des empereurs romains; on connaît le mot profond de Vespasien que des courtisans cherchaient à mettre en défiance contre un certain Mélius, sous prétexte que l’horoscope de ce Mélius lui promettait la couronne impériale !

"S’il doit un jour, dit le sceptique empereur, monter au rang que j’occupe, il est prudent de m’assurer des droits à sa reconnaissance" et il le nomma consul.

Cette décadence ne fut que momentanée, et l’on vit la mode des horoscopes reparaître au moyen age avec l'astrologie. En France, ce fut une véritable fureur à partir de la seconde moitie du XVI° siècle. Les bons et les mauvais exemples venant, comme on l’a dit, d’en haut, la manie horoscopique de Catherine de Médicis gagna toutes les classes de la société, si bien qu’au XVII° siècle cette divination conservait encore un caractère officiel.

A la naissance de Louis XIV, son horoscope fut dressé avec la plus grande solennité. Ne fut-ce pas aussi vers le même temps qu’un forcené tireur d’horoscopes a imaginé de compléter le recueil des horoscopes des princes nés par les horoscopes des princes à naître et dresse le calcul des destinées des Louis, rois de France, depuis le chiffre XVI jusqu’au chiffre XX, horoscopes curieux qu’on peut lire dans la belle collection des manuscrits de la bibliothèque de l’Arsenal à Paris ?

Inutile de vous dire que le prophète n’a prévu ni la Révolution française, ni ce qui s’en est suivi. Quoi qu’il en soit, l’horoscopie fut si fort à la mode au XVII° siècle que deux savants illustres et sérieux, Kepler et Ozanam , se virent contraints de faire des horoscopes, l’un pour gagner sa vie, l’autre pour ne pas mécontenter ses protecteurs puissants. Ozanam eut toutefois l'avantage de pouvoir désabuser plus tard un de ceux de qui il avait involontairement exploité l’impérieuse confiance. Voici comment :

Un comte allemand lui avait demandé son horoscope sans lui dire qu’il le faisait tirer en même temps par un médecin de la cour. Le docteur, qui était de très bonne foi, y procéda suivant toutes les règles de l’astrologie; quant à Ozanam, sa complaisance se mit en frais d'imagination, et il écrivit au hasard à peu prés tout ce qui lui passa par la tête de logique et de quelque peu vraisemblable; naturellement les prédictions des deux devins furent loin de concorder. Au bouts de vingt ans, le comte annonça à Ozanam que toutes ses prédictions s’étaient réalisées, tandis que celles du docteur s’étaient trouvées absolument fausses. Quelle ne fut pas la surprise de l’illustre savant en apprenant ce résultat ! Quelle ne fut pas aussi la surprise du gentilhomme quand le savant lui révéla que la science avait été complètement étrangère à ses prophéties !

C’est encore au XVII° siècle que le père Yves, capucin, publia les horoscopes de divers États de l'Europe pour les deux siècles suivants. Ce livre, aujourd’hui presque introuvable, produisit une telle sensation, que plusieurs gouvernements, croyant fondés à se plaindre des destinées qu’il leur prédisait, demandèrent et obtinrent des rectifications sur les éditions postérieures à la première.

Mais il n’est pas besoin de remonter si haut pour trouver des personnages illustres disposés à croire à l’horoscopie. On sait qu'il se fit pas mal d'horoscopes au XVIII° siècle, à cette époque de scepticisme qui fut en même temps l’époque de Voltaire, de Diderot, de J.J. Rousseau et l’époque de Cagliostro, du comte de Saint-Germain et de Cazotte.

Quant au XIX° siècle il compte au premier rang des croyants à l’horoscopie, Napoléon 1er en personne; il avait foi en son étoile; plusieurs passages des mémoires contemporains et diverses pages du Mémorial de Sainte Hélène en témoignent clairement.

Nous pourrions citer quelques noms encore plus contemporains, mais il faut respecter la foi de chacun, pour avoir le droit de faire respecter soi-même ses croyances.

Parmi les mystifications comiques en matière d’horoscopes, il faut citer l’histoire de ce duc de Mantoue, au XVI° siècle, je crois, qui, ayant dans ses écuries une jument qui venait de mettre bas un mulet, envoya aussitôt aux plus célèbres astrologues d’Italie l’heure de la naissance de cet animal, en les invitant à lui faire l'horoscope d’un bâtard né dans son palais. Les devins, persuadés qu’il s’agissait d’un bâtard du prince, firent les horoscopes les plus enguirlandés de vertus, d’honneurs et de dignités; les uns prophétisaient qu’il serait général d’armée, d’autres grand savant, tous personnage illustre et éminent.

L'étude des signes du zodiaque au point de vue astrologique a suggéré dés longtemps, aux devins, l’idée de préparer à l’avance des horoscopes tout faits à l’usage de tous les individus qui naissent sous l’ascendant de tel ou tel signe. Des le XVIII° siècle, l'astrologue napolitain Thomas-Joseph Moult donnait ses prédictions perpétuelles, annonçant les événements importants et les conditions générales des saisons pour toutes les années, depuis l269 jusqu’à 2024, ouvrage qui a été imprimé à toutes les époques et tout récemment encore, avec un Traité fort curieux de la bonne on mauvaise fortune des enfants sur les douze signes du zodiaque. Depuis, presque tous les livres de divination et de prophéties ont publié de ces horoscopes, vraisemblablement écrits au hasard et suivant les inspirations de la fantaisie de l’auteur, car ils varient sur presque tous les points, selon les auteurs. Il en est de même des horoscopes tout faits que les bateleurs débitent sur les places publiques aux personnes qui veulent bien les honorer de leur confiance et de leurs deux sous.

 

Tiré de 'L'art de tirer les cartes' par Antonio Magus, 1875.

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